Les aventures potiron-potiron de Zak Galou - Episode suivant : Zak Galou et Halloween
Le diabétisme en phase terminale de mes parents n'y est peut-être pas pour rien.
En envoyant leur progéniture au front, les parents augmentent de près de 200% leur chance d'aller piquer des bonbecs aux voisins. Il suffit pour vous en convaincre que vous vous rappeliez la dernière fois que vous êtes allé récité un poème gerbant à votre voisine à serre-têtes et collier de perles : vous a-t-elle pour autant offert de lui mettre la main au panier ? Que nenni ! Tout au plus est-elle partie d'un hurlement strident afin, soit de vous vriller les tympans, soit de prévenir le père de ses douze enfants afin qu'il composât le 17.
Nous venons donc de mettre à jour la motivation réelle des parents, mais qu'en est-il de celle des enfants, ces êtres à mi-chemin entre Alien (1 à 4) et un Télétubbies ? On peut d'ores et déjà exclure l'appât du gain, puisqu'il n'a généralement pas le droit de se goinfrer de sa récolte, savamment confisquée par papa-maman. On peut douter qu'il le fasse pour le simple plaisir d'aller se ridiculiser dans son costume de pirate des caraïbes en papier kraft.
La raison de son engouement ne vient évidemment pas de l'envie de faire plaisir à ses parents, qui outre leur gourmandise ont un autre pêché : la vanité. Ils sont si fiers d'envoyer leurs demi-portions parader dans le voisinage que c'en est répugnant, même pour les gosses en question.
Non, la véritable raison qui les pousse à hanter les hall d'immeubles en sonnant aux interphones et aux portes, c'est qu'ils ont le secret espoir, au choix :
_ d'assister, voire participer, à une tournante ; plutôt rare dans les milieux ouvriers, les tournantes en cave sont néanmoins courantes dans certaines résidences bon-chic-bon-gore.
_ d'échapper au policier de TF1, au docu-politique de France 2, au Thalassa-Pour-Un-Champion de France 3, au docu sur la seconde guerre mondiale sur Arte, et pour finir au docu-coaching de M6.
_ de se barrer : c'est là un espoir commun à tout enfant qui se respecte : mettre les voiles. Malheureusement, il y a une troisième catégorie qui tire profit de cette fête grotesque où l'on déguise les mioches en monstres - "Oh mon dieu Mariodile ! Le déguisement de ta fille en catin du 18ème est super, et ce maquillage façon clavier-azerty, c'est splendide ! _ Elle m'a piqué une robe, et elle est pas maquillée, connasse".
Cette troisième catégorie est constituée des adolescents qui, trop vieux pour apitoyer les voisins , ne peuvent se prévaloir d'aller chercher les bonbons. Ils sont les baby-sitter ambulants d'un groupe de mioches, payés par plusieurs familles à la fois, ou pire faisant bénévolement pour faire plaisir aux parents.
Combien de fois Zak Galou n'a-t-il pas accompagné deux ou trois mioches dans Brou sur Chantereine, dans le secret espoir de tomber sur une bourgeoise seule et accueillante ?
Voyons ensemble ce souvenir émouvant d'une soirée d'Halloween : Zak Galou chapote trois moutards, la fille déguisée comme il se doit en sorcière au bois dormant, et les deux garçons respectivement en Bill Gates et un tenant du non à la constitution. Zak Galou, lui, n'est pas déguisé : il est le garant de l'intégrité intellectuelle, morale et physique des enfants. Il a mis son jean dégueu et son tee-shirt du Che, celui où il fume un pet' avec Mahomet, qui est assis sur les genoux de Staline dont il chatouille négligemment la moustache. Rien de bien effrayant, donc.
La maison dont ils approchent est dasn le noir - de loin, on jurerait qu'elle est abandonnée, mais la boîte aux lettres porte un nom : "Palamède B.".
"Eh, gros connard, demande gentiment la fille à notre héros, pourquoi ki met pas son nom dans toutes les lettres complètes ?
_ Ce doit être une star anonyme, répondit Zak Galou en ne s'offusquant pas du ton un peu familier de la fillette.
Ils sonnent à la porte, qui s'entrouvrent au bout d'un long moment sur un être efflanqué, à l'allure pas tibulaire mais presque. Il contemple un moment le groupe de visiteurs et dit :
"Bon Ségolène, c'est pas la peine que tu viennes, je t'ai déjà dit sur ton blog que je voterais pas pour toi ok ? Quant à toi, Bill, je trouve que ce que tu fais avec ta company, c'est complètement glucose, tu piges ?" Il se tourne ensuite vers le tenant du non à la constitution : "Toi mon petit, tu es un brave gars, rentre, je vais te montrer mon sucre d'orge." Puis à l'adresse de Zak Galou, plutôt content de s'être débarassé d'un des trois : "Ecoute jeune prépubère, tu vas te tirer d'ici vite fait, et tu n'as rien vu ok ?
_ C'est que... c'est mon p'tit frère Flo Galou que vous venez de faire entrer chez vous. J'aura bien aimé le récupérer pour plus tard."
Mais l'étrange habitant avait déjà fermé sa porte. Zak Galou ne revit plus jamais son frère, enfin au moins jusqu'à ce que la police le retrouve le lendemain.