Laïp Siks Thesis

Ce matin-là il y avait du brouillard. Et pas seulement sur ses lunettes, que le froid avait tendance à constiper. Zak Galou avançait d'un pas incertain - c'est le pas situé entre le pas décidé et le pas du tout - vers l'arrêt du bus. En passant, il léchait un peu les vitrines : la nouvelle pub de jeanlouidavid lui donna envie d'aller au coiffeur, mais ce fut surtout la devanture d'un supermarché Atac (du nom de la fameuse association haltère-mondialiste) qui l'arrêta net dans le cheminement de sa pensée. Il s'aurait bien arrêter le cheminement de ses pieds, mais il ne voulait pas qu'on croit qu'il était aussi facile d'arrêter le cours du Galou ; accessoirement, il ne voulait pas râter son bus.
L'idée, saugrenue mais intrépide, qui lui était venue en contemplant un calendrier de l'avent (outre l'évidente faute d'orthographe, puisqu'il faut dire "calendrier du vent" à la place), était que Noël, à l'envers, donne Leon.

Dans la vie d'un homme, certaines intuitions tombent juste, et d'autres pas. Zak Galou y repensa longuement au cours de sa journée de thèse :
"Si ça se trouve, ce connard de Père Léon avait écrit Léon à l'envers sur le capot de son traineau, comme les types du Samu, et un chti n'enfant a lu Noel à la place. Depuis, pour pas foutre les mioches dans la merde, le père Léon se fait appeler le père Noël..."

Ce n'est qu'en se couchant, vers 14h30, qu'il comprit qu'il existait un moyen simple de vérifier son allégation :
"C'est pour ça qu'on n'a jamais pu trouver la mère Noel !!" se dit-il en tapant du poing droit sur la paume de sa main gauche, ce qui n'est pas facile sous la couette. "Il suffit de mettre la main sur la mère Léon, et là je deviens célèbre, je les vend à la presse people et j'me tire au Groenland avec le pognon !!"

Heureux, le petit Zak Galou s'endormit d'un sommeil enfantin.

Quand il prenait le métro, Zak Galou avait l'habitude d'engager la conversation avec ses voisines, sans réellex intentions sexuelles, mais quand même un peu. Il arrivait que sur un malentendu, il tombât sur une touriste égarée qui pour retrouver son chemin ou une carte de séjour était prête à donner de sa personne. Du point de vue de la fille, se disait-il, c'est un conte de fées qu'elle est en train de vivre, alors que, pour moi, ce n'est rien qu'un détour pour aller de Gare de Lyon à Montparnasse. Un jour, alors qu'il cherchait des yeux une proie sur laquelle jeter et son dévolu et son cartable de thésard, il tomba nez à seins - il était assis sur un strapontin - avec une lycéenne déjà très intelligente pour son âge.
"Salut, lui dit-il en sachant trouver les mots. Ca wizz ?
_ Grave sa mère", lui répondit-elle en lui montrant et son appareil dentaire et sa croupe accroupie tandis qu'elle refaisait son lacet.

Avec Roberta*, il se positionna très vite en mentor : il ne fit que lui raconter des mensonges éhontés afin de l'impressionner. Quand enfin il parvint à ses fins, il put tendre une main moite vers le postérieur blanc moulé de la fille, et il eut cette réflexion philosophique sur la vie :
"Tu vois Béber, dans la vie, tout n'est qu'une question de point de vue. Actuellement, tu te dis que j'ai une petite main. Et moi je pense que tu as un gros cul."


* Le prénom n'a pas été modifié afin de préserver l'anonymat du personnage